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Les finances de l'indépendant

L'équation des finances de l'indépendant est simple: s'il y a du travail, il y a de l'argent; s'il n'y a pas de travail, il n'y a pas d'argent. Parfois, il y a trop de travail et pas assez d'argent -- ça, c'est un problème de tarification, dont on parlera une autre fois.

Ce qui m'intéresse juste maintenant c'est l'impact qu'a cette équation sur certaines négociations client. En effet, pour le client généralement salarié, le salaire tombe à la fin du mois, qu'il avance ou non sur tel ou tel projet, qu'il soit en vacances, surchargé, ou un peu désoeuvré.

Les discussions sans fin avant la conclusion d'un mandat ou le démarrage d'un projet laissent souvent l'indépendant "dans les limbes". Est-ce que je dois garder du temps pour ce client? Est-ce que je dois dire non à cet autre client potentiel, du coup? Est-ce que ça va se matérialiser?

On fait donc des pronostics, des prévisions. OK, celui-ci a l'air solide, je vais dire à l'autre que je ne pourrai donc pas démarrer avant juin. Ou au contraire: ça traine, je vais donc continuer à prospecter et ne pas trop compter dessus.

A la clé, pour ceux qui vivent un peu au mois par mois: est-ce que ça va aller pour payer le loyer et les charges dans 2 mois?

Souvent sans certitudes, on doit parier. Et du côté du client, on sent bien que l'enjeu n'est pas le même. Ah oui, en fait, ce gros projet qu'on voulait démarrer avec vous le mois prochain, on va repousser de 6 mois, c'est pas grave, hein? Mais non, bien sûr, je vais payer mes factures avec mon temps de libre, voyons. Ou bien: on aimerait que vous bloquiez une semaine de votre temps pour nous dans 2 mois même si votre offre ne nous convient pas. Nous aussi on fait des heures sup' non payées, vous savez.

Un retour en arrière quand les négociations semblaient avancer solidement, ça revient à tirer le tapis de sous les pieds de l'indépendant, littéralement, et le laisser trop souvent avec rien, un manque à gagner sec.

Certes, on devrait avoir 3 à 6 mois de "tapis" financier pour les coups durs, et facturer assez pour "absorber" toute cette énergie perdue en négociations qui finalement ne mènent nulle part... mais la réalité est que grand nombre d'indépendants sont bien plus fragiles financièrement que ça.

Autre plaie: le travail en amont. Faites-nous donc une proposition détaillée puis on regardera si on peut travailler ensemble. Je sais qu'il y a des personnes qui fonctionnent comme ça, qui passent un temps fou à préparer des pitches et des propositions non payés et qui débouchent souvent sur rien -- c'est plus courant dans certains domaines que d'autres. Ou des fois, c'est carrément: ah, commencez déjà le travail, puis on verra...

Entre le client-entreprise et l'indépendant, le rapport de forces est très inégal, et j'ai l'impression que souvent l'entreprise n'en a absolument pas conscience.

"Boucler" -- les micro-délais quand on est maître de son temps

Un des effets de bords très intéressants de mon utilisation de la technique pomodoro (voir mes articles de juin et de juillet à ce sujet) c'est que je passe moins de temps à faire certaines choses. Quand on est maître de son temps, et que comme moi on aime faire les choses bien, on prend le temps de les faire. Tant pis s'il faut passer 2h sur un e-mail. Alors, c'est pas mal, parce qu'on évite de stresser pour finir, mais ça veut aussi dire que des fois on passe plus de temps qu'il n'en faudrait à peaufiner chaque chose que l'on fait.

Bien sûr, il y a les "gros délais", qui font qu'on se retrouve à travailler des fois le dimanche ou tard dans la soirée (le moins possible, on espère), mais dans l'ensemble, la plupart de mes journées sont assez cool. Et là, je ne suis pas aussi efficace que je pourrais.

Alors mes tomates, elles m'aident, parce que quand j'ai prévu 1P(omodoro) pour écrire un e-mail, et que je vois arriver la fin des 25 minutes ("bon sang! plus que 3 minutes!") j'avoue que ça m'encourage à donner un coup d'accélérateur pour boucler plutôt que de repartir dans une deuxième tomate.

Du coup, je me retrouve de plus en plus souvent à "faire en sorte" que ma tâche tienne dans le temps imparti. Ça ne marche pas toujours (des fois je découvre que ce n'était pas une mais trois tomates qu'il me fallait), mais régulièrement, j'évite de m'éterniser sur des activités qui se diluent avec le passage du temps.